Quarante-et-un an après sa sortie en double 33-tours, “Live Evil” de Black Sabbath entre enfin dans la légende grâce à sa version “Super Deluxe”. Doc Sillon se souvient de Ronnie James Dio, Tony Iommi, Geezer Butler et Vinny Appice, les Fab’ Four du heavy metal.
Hey les jeunes, dites-vous bien que de Black Sabbath, il n’existait alors aucun album live digne de ce nom. “Live At Last” ? Vous plaisantez j’espère. Ce concert enregistré en 1973 avec, certes, la formation originale – Ozzy Osbourne, Tommy Iommi, Geezer Butler et Bill Ward – avait été publié en 1980 sans la permission du groupe, tandis que le Sab’ commençait son opération résurrection avec son nouveau chanteur exfiltré de Rainbow, Ronnie James Dio. Bref, on n’y comprenait rien et, en plus, on n’avait pas aimé ce disque mal enregistré.
Donc, pas d’équivalent de “Made In Japan”, de “Stangers In The Night” ou de “Live And Dangerous” – dois-je vous faire l’injure de rappeler que ces légendaires opus avaient été gravés dans le marbre électrique par Deep Purple, UFO et Thin Lizzy ? – pour nos quatre super héros du metal, le lutin-Pavarotti à la voix d’or évoqué plus haut, Tony Iommi le riffeur de génie, Geezer Butler et Vinny Appice, le bassiste et le batteur qui donnaient tout leur sens au mot heavy.
Alors, vous n’imaginez pas quelle fut notre excitation quand sur les facings des disquaires apparut la somptueuse pochette (qui s’ouvrait) de “Live Evil”, le tant attendu double live du Sab’. (Je me souviens un copain fan de jazz et de Miles Davis m’avait dit : « Sont pas gênés tes potes là, il y a déjà un double live de Miles qui s’appelle “Live Evil”…»)
Plus de quarante après, le mystère demeure : pourquoi, alors, n’avions pas sauté au plafond en découvrant ce puissant raffut ? “Heaven And Hell” en 1980, “The Mob Rules” en 1981 : avions-nous déjà eu notre dose de plomb fondu ? Les versions des classiques seventies du groupe interprétées par Ronnie James Dio nous perturbèrent-elles ? Après tout, c’était la première fois qu’on ne les entendait pas chantées par ce vieux fou d’Ozzy – cela dit, si on nous avait dit qu’un an plus tard on les (re)découvrirait avec Ian Gillan au micro, on aurait peut-être éclaté de rire !
Allez donc savoir…
Pourtant, feu R.J.D. était parfait, et N.I.B. (très impressionnant), Black Sabbath ou Iron Man réincarnés par ses soins avait revigoré les autres membres du groupe, cela s’entendait.
La prise de son, le mixage alors ? C’avait dû jouer, car quelque chose ne tournait pas rond de ce côté-là. Et puis la rumeur disait que Dio avait déjà quitté ses trois compères, que le simple fait que le “James” de son nom ait été oublié l’avait mis en pétard (il était effectivement crédité “Ronnie Dio” au verso). Encore une fois, la guerre des egos faisait rage, plus ravageuse que la War Pigs…
Miracle : quarante-et-un plus tard, “Live Evil” nous explose enfin en pleine figure comme il aurait dû le faire en 1982. Grâce au formidable “40th Anniversary Remix” qui enfonce dans les limbes de l’enfer la version originale – qui est tout de même inclue dans le coffret, remasterisée, pour les nostalgiques aux cheveux blancs. C’était donc ça : le SON ! Qui rend enfin justice à l’alchimie singulière qui unissait ce groupe devenu anglo-américain et qui, comme disit Tonton Zézé, nous ramonait méchamment les cages à miel.
“Live Evil Super Deluxe” sort demain, avec son beau livre de 60 page (story, photos rares…), un poster et le fac-similé du tour book de la tournée. Bien plus heaven que hell à vrai dire. Ne manquez pas ça, en vinyle ou en CD, au choix, pas de jaloux !
CD / LP Black Sabbath : “Live Evil Super Deluxe” (BMG, sortie le 2 juin).
Photo : Weiss (BGM).