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Led Zeppelin, ici Londres, vous écoutez la BBC…

Jimmy Page continue de rééditer dans les grandes largeurs le fond de catalogue de son groupe chéri. Cette fois, ce sont les “BBC Sessions” parues à l’origine en 1997 qui bénéficient du traitement Deluxe : triple cd, coffret vinyle, coffret cd/vinyle… Ladies and gentlemen, for your listening pleasure, here’s “The Complete BBC Sessions” … Spécial bonus muziq.fr : Jimmy Page en différé de Londres parle de “The Complete BBC Sessions” !

John Paul Jones, Jimmy Page, Robert Plant et John Bonham, aka Led Zeppelin

John Paul Jones, Jimmy Page, Robert Plant et John Bonham, aka Led Zeppelin

Londres, dimanche 4 avril 1971. Il est sept heures du soir. James McGregor, 14 ans, grand fan de Led Zeppelin depuis la sortie de leur premier album, vient de fermer la porte de sa chambre à double tour. Il n’a toujours pas fait ses devoirs, « but the hell with it » : l’une de ses émissions de radio préférées, In Concert, va commencer d’une minute à l’autre. James reconnaît la voix familière du présentateur John Peel… Son rythme cardiaque s’accélère… « Would you welcome please, Led Zeppelin… »
Le feu roulant d’Immigrant Song et le chant possédé de Robert Plant manquent de faire fondre le petit haut-parleur de son transistor : « Ah ah haaaaa aaah… Ah ah haaaaa aaah… We come from the land of the ice and snow, from the midnight sun where the hot springs flow… » S’il pouvait enregistrer ça ! (James ne sait évidemment pas encore que vingt-six ans plus tard il s’offrira le double cd “BBC Sessions” pour ses 40 ans…) Et voilà Dazed And Confused… Celle-là aussi il l’adore ! Quelques jours plus tôt, ils l’avait d’ailleurs jouée au Marquee Club, où James avait pu se rendre avec ses deux cousins pour voir Led Zeppelin. Un concert qu’il n’est pas près d’oublier…
Tiens, il lui semble bien reconnaître maintenant cette longue ballade qui commence comme une vieille chanson folk et qui finit en apothéose électrique. Comment s’appelle-t-elle déjà ? Ah oui, Stairway To Heaven… Il ne figure sur aucun album pour l’instant… Pourvu qu’elle soit dans le prochain !

led-zeppelin-pochette-iAinsi, James McGregor a découvert Stairway To Heaven en direct à la BBC un soir d’avril 1971. C’était la toute première fois que ce titre légendaire était diffusé à la radio. Trois millions de fois après, environ, Stairway To Heaven est ancrée dans la mémoire collective de tous les amateurs de rock. “The Complete BBC Sessions” vous permettra de revivre comme à la radio les émois jamesmcgregoriens. Le double cd paru en 1997, remasterisé pour l’occasion, devient triple, car le gardien du temple Jimmy Page a ajouté un companion disc qui reprend exactement le contenu d’un album pirate des années 2000, “The Missing BBC Sessions Tracks” – on imagine qu’il figure dans sa collection, lui qui écume discrètement les conventions du disque pour dénicher des 45-tours de blues rares et des bootlegs de Led Zeppelin. (Imaginez la tête des vendeurs…)
Le grand public va donc pouvoir découvrir neuf titres (officiellement) inédits, parmi lesquels de chouettes versions de What Is And What Should Never Be (celle du Aeolian Hall Studio, hélas shunté…), Dazed And Confused (Playhouse Theather) et Communication Breakdown (Paris Cinema), et une chanson jamais enregistrée en studio, Sunshine Woman (ce qui peut se comprendre pourquoi quand on l’écoute : même Livin’ Lovin’ Maid est d’une qualité largement supérieure).

led-zeppelin-nature-morteLa version 5 vinyles et 3 cd (+ un code pour télécharger le tout en HD) de “The Complete BBC Sessions” s’impose à tous les Led Zeppelin fanatics. Outre la qualité des pressages vinyles et le design chic et sobre des pochettes de cd, le magnifique livret de 44 pages nous en apprend de belles : détails d’enregistrement hyper-précis, commentaires morceau par morceau, un travail de fourmi réalisé par le ledzeppelinophile – ledzeppelinologue ? ledzeppelinolâtre ? – Dave Lewis, rédac’ chef du fanzine de référence Tight But Loose. « Dans le livret de “The Complete BBC Sessions », rappelait il y a peu Jimmy Page lors d’une rencontre avec la presse à l’Olympic Studio de Londres,  » on trouve des documents qui montrent que nous passions réellement des auditions pour ces émissions. On enregistrait une session, puis on nous rappelait pour nous en proposer une autre, mais tout allait si vite que je crois que nous avions déjà enregistré quatre sessions avant de recevoir une lettre nous expliquant que nous avions été acceptés à l’audition ! Il y a vingt ans, j’avais publié une version cd des “BBC Sessions”. J’avais dû mettre quelques titres de côté à cause des limites de durée des cd. La renaissance du format vinyle exigeait qu’on les ressorte de manière plus complète. Je voulais aussi les placer en contexte avec la reédition des albums studio et les companion discs qui donnaient une vision panoramique du travail de Led Zeppelin en studio. “The Complete BBC Sessions” documente tous les passages deLed Zeppelin à la radio, et on ne faisait pas de prisonniers lors de ces sessions ! Il y a de la dynamique, de l’improvisation, on entend le groupe progresser lors de ces sessions enregistrées entre 1969 et 1971. »

led-zeppelin-pochette-iiJimmy Page, toujours lors de la conférence de presse de l’Olympic Studio : « J’ai fait partie des Yardbirds et j’ai vu comment le marché des 45-tours pouvait tuer un groupe. Du coup je ne voulais pas que Led Zeppelin produise des 45-tours. Les radios underground américaines diffusaient parfois des faces d’albums entières, ce qui correspondait mieux à la musique de Led Zeppelin. C’est pour ça que le groupe a décollé si vite aux États-Unis. Bien sûr, il y avait les concerts, mais les radios américaines ont été très importantes. En Grande-Bretagne, nous n’avions pas de 45-tours, et nous ne pouvions pas passer à la radio. Notre seul moyen d’y passer, c’était par le biais des BBC Sessions. Il fait aussi se rappeler qu’à l’époque, il y avait beaucoup moins de médias qu’aujourd’hui, juste quelques magazines et Radio One. A l’antenne, nous disposions d’une heure ou deux en général. Comme vous pouvez l’entendre dans “The Complete BBC Sessions”, le concert du Paris Cinema en 1971 a été enregistré en stéréo, tout le reste est en mono, mais nous avons parfois eu l’opportunité d’ajouter des overdubs. La bande était mono, mais on pouvait ajouter des pistes par-dessus. C’est pour cette raison qu’on entend parfois la voix doublée de Robert sur les refrains et le clavier de John Paul Jones dans Since I’ve Been Loving You… Il y aussi des overdubs de guitare, comme sur la version de Whole Lotta Love de l’émission Top Gear par exemple. Cette session avait eu lieu en juin 1969, et “Led Zeppelin II” n’allait sortir que quelques mois plus tard, en octobre, et je joue une approximation du pont instrumental de Whole Lotta Love. Par chance, on pouvait parfois tomber sur des ingénieurs du son qui comprenaient exactement ce qu’on voulait faire. Ceux de la BBC avaient l’habitude d’enregistrer du jazz, de la musique classique, du folk et sans doute du skiffle. Nous étions survoltés lors de ces sessions, l’énergie était intense mais ils étaient de vrais professionnels et ils ont fait du très bon boulot, comme on peut encore le constater plus de quarante ans plus tard. Ils ne savaient pas sur quoi ils allaient tomber avec nous. En général, nous commencions par Communication Breakdown, puis on suivait avec Dazed And Confused pour illustrer les deux facettes et la dynamique de Led Zeppelin. La version de Dazed sur ce coffret est très bien enregistrée d’ailleurs. Nous avions l’habitude d’enregistrer trois ou quatre titres par session, en commençant par Communication Breakdown et en espérant que la BBC allait diffuser les autres… Dans “The Complete BBC Sessions”, on trouve trois titres qui ne figurent pas dans les albums de Led Zeppelin. Ce sont presque des improvisations, du type « 1, 2, 3, 4, let’s go ! ». Il y a Sunshine Woman, The Girl I Love Has Long Black Wavy Hair et Travelling Riverside Blues, que les fans connaissent mieux. Les fans se demandent pourquoi ces titres ne figurent pas dans nos albums : la raison est que nous composions tout le temps et que nous avancions en permanence. » Au micro : Guillaume Lutrèze

PS I : Avant de quitter son auditoire attentif, Jimmy Page a déclaré ceci : « J’effectue un travail de réédition depuis pas mal d’années, mais il est désormais temps de dépoussiérer ma guitare, sans doute l’an prochain. » 2017, l’année du grand comeback ? On n’ose y croire, mais on croise les doigts !
PS II : Un seul (petit) regret : pourquoi ne pas avoir réédité tous ces enregistrements dans l’ordre chronologique ?
PS III : À quand, Monsieur Page, une réédition Super Deluxe du premier album de Page & Plant, “No Quarter” ? It’s time now !