En rupture avec ses camarades de CSN, le Croz’, épaulé par Michael League (Snarky Puppy), signe un des meilleurs albums de 2016.
À l’Olympia, en septembre 2015, David Crosby s’approche du micro tandis que Stephen Stills et Graham Nash reculent d’un pas vers le fameux rideau rubicond. « C’est un nouvelle chanson que je viens d’écrire et j’aimerais vous la chanter », annonce presque timidement l’Artaban septuagénaire avant de mettre à genoux l’auditoire avec une merveille inédite délivrée en open-tuning. On retrouvera « Somebody Home » quelques mois plus tard sur Family Dinner vol.2 de Snarky Puppy. Cette méditation mi-grave, mi-amusée sur l’érosion du couple, en plus de relever le bas niveau d’un album incolore, scellera la rencontre du trublion de CSN et de Michael League, leader-producteur du collectif multigenres.
À l’inverse du superbe Croz (2013), Lighthouse, enregistré en quinze jours dans le studio de Jackson Browne à Santa Monica, dépouille ses nouvelles compositions de leur potentiel électrique dans un environnement 100% unplugged. Pas de batterie non plus à signaler, le seul élément percussif recensé étant le strumming des doigts sur les cordes des guitares entrelacées de David Crosby et Michael League, le co-producteur de l’album. Les harmonies à deux voix du vétéran du Laurel Canyon et de son apprenti « jazz mais pas que » éclairent une production baignant dans les ambiances claires-obscures d’orgues du petit matin et de larsens fantomatiques (« Drive Out To The Desert », « Look In Their Eyes »). « By The Light Of The Common Day », la conclusion de Lighthouse, propose également une émouvante « triade » vocale avec le renfort de Becca Stevens.
À nouveau en rupture de ses faux-amis des années dorées (suite, entre autres, à des déclarations médiatiques sans filtre) David Crosby signe à 74 ans le digne écho des modulations bouleversantes d’If I Could Only Remember My Name. À l’instar de son chef-d’oeuvre crépusculaire de 1970, Lighthouse est un phare dans la nuit.
David Crosby Lighthouse (Verve/Decca/Universal). Sortie le 21 octobre
(Photo ouverture : Rachael Wright/Camera Press/Redux)