Avec “Ventriloquism”, Meshell Ndegeocello revisite onze chansons extraites de son panthéon amoureux, dont George Clinton, Tina Turner, Sade, Janet Jackson et Prince font notamment partie.
Comme un effet de palimpseste sur le vieux parchemin des amours perdues, les premiers accords de Sometimes It Snows in April de Prince surgissent peu à peu du passé, dessinent les contours d’un passé encore trop récent, d’une douleur toujours aussi vive. Que faisait, où était Meshell Ndegeocello le 21 avril 2016 ? Chez elle ? Sur la route ? Peu importe. On l’imagine sans peine empoigner une guitare acoustique et se mettre à fredonner de sa voix sombre et voilée les paroles de la plus bouleversante ballade de Prince. Dans son nouvel album, subtilement-malicieusement nommé “Ventriloquism”, Meshell est la subtile porte-voix de onze chansons qui ne sont pas d’elle, mais qu’elle fait sienne avec ce doux mélange de tendresse et d’autorité.
Et si sa frissonnante relecture aux accents americana de Sometimes It Snows in April ne laissera certainement pas les Prince lovers indifférents, nul doute que sa bluffante réinvention de l’hymne cynologique de George Clinton, Atomic Dog, ne laissera personne indifférent non plus. Tout autant que le Sensitivity de Ralph Tresvant, avec ses petits effets de brass band… Sans parler du Funny How Time Flies (When You’re Having Fun) de Janet Jackson, resongé en mode lunaire, avec monologue amoureux en français dans le texte. Egalement transfigurés avec maestria, la ballade soul de The Force M.D.’s, Tender Love (Meshell adore les ballades soul romantique, y’en a même qui l’on vue danser sur You Are My Starship de Norman Connors…), et Smooth Operator de Sade. Et puis, et puis… et puis stop ! Vivent les surprises.
Soit, au total, onze reprises toutes aussi inventives et créatives les unes que les autres. “Ventriloquism” marquera à coup sûr le grand retour d’une des plus fascinantes artistes apparues dans les années 1990. Rendez-vous le 16 mars. •
CD “Ventriloquism” (Naïve, sortie le 16/3)