Ce devait être au tout début des années 1980. Votre Doc était encore jeune lycéen, et déjà avide de musiques bien sûr. Fort impressionné par la pochette du disque, signée Hypgnosis, je venais d’emprunter “Lights Out” d’UFO à la discothèque de Saint-Ouen (la meilleure du 9.3). Too Hot To Handle, Lights Out, Love To Love : les raisons de s’enthousiasmer ne manquaient pas. Du hard-rock briton pur jus, puissant, canaille, macho mais pas trop, gorgé de feeling bluesy, illuminé par la voix de Phil Mogg, le chaînon manquant entre Paul Rodgers et David Coverdale, et griffé par la guitare piquante et mordante de Michael Schenker.
Sur la seconde face, une chanson m’avait de prime abord déconcerté, voire déplu : Alone Again Or. N’ayant pas remarqué qu’elle n’était pas signée Mogg, Schenker ou Pete Way mais par un certain Bryan McLean, je ne pouvais pas savoir que c’était en réalité une reprise de Love, un groupe alors totalement inconnu à mon petit bataillon. (Il faut dire qu’avant que Rhino ne le réédite pour la première fois en CD, il me semble que “Forever Changes” était un secret bien gardé ici bas.) C’est le producteur Ron Nevison qui avait soufflé aux boys d’UFO l’idée d’enregistrer une reprise. Mais c’est Phil Mogg qui avait choisi Alone Again Or.
Ainsi, avant d’être un merveilleux bijou de pop baroque made in USA serti d’arrangement façon Herb Alpert & The Tijuana Brass, Alone Again Or fut pour moi le morceau le plus troublant d’un disque de hard-rock anglais. C’est drôle, parfois, les chemins détournés qu’on emprunte avant d’arriver là où la logique aurait voulu qu’on commence… Vous l’aurez donc compris : cette reprise du petit chef-d’œuvre de Love, je la love aussi. Écoutez-la, réécoutez-la, et vous serez surpris, autant, sans doute, que le jeune Doc naguère. •
CD “Lights Out” (Chrysalis, 1977)