L’indispensable label anglais ressort les trois derniers disques CTI du regretté saxophoniste américain : Doc Sillon les a réécoutés pour vous.
Entre 1970 et 1975, Joseph Carl Firrantello, alias Joe Farrell, a enregistré six albums pour CTI (plus un en coleadership avec George Benson, “Benson & Farrell”). Les trois premiers, “The Joe Farrell Quartet” (1970), “Outback” (1972) et “Moon Germs” (1973) ont récemment été réédités par BGO Records, regroupés en un double CD où rien ne manque : livret détaillé, liner notes savantes signés Charles Waring et remastering soigné. BGO Records, qui continue de faire le travail que les major companies délèguent désormais aux labels indés déterminés à faire vivre le disque “physique”, vient fort logiquement de publier les trois suivants : “Penny Arcade” (1974), “Upon This Rock” (1974) et “Canned Funk” (1975).
Dans “Penny Arcade”, le saxophoniste ténor (qui doublait au soprano et jouait aussi de la flûte) est à la tête d’un all stars typique des productions supervisées par le boss de CTI, Creed Taylor : Joe Beck à la guitare, Herbie Hancock au piano et au Fender Rhodes, Herb Bushler à la basse, Steve Gadd à la batterie et Don Alias aux percussions. Des musiciens d’exception pas seulement venus pour empocher leur cachet mais 100 % impliqués dans la musique, enregistrée comme il se doit par le légendaire Rudy Van Gelder dans le non moins légendaire Studio qui portait son nom. Le titre éponyme qui ouvre l’album est un funkyssime standard du jazz électrique, dont Uzeb avait fait son miel en 1982 dans l’album qui les révéla en France, “Fast Emotion”. La reprise de Too High de Stevie Wonder permet de goûter le son de sax soprano du leader et la belle partie de guitare ouaouatée de Joe Beck. [Votre Doc collectionne les reprises de Too High, et celle-ci s’ajoute à celle(s) de Freddie Hubbard…] Beck brille encore dans Geo Blue, et tisse un élégant solo en single notes finement ciselées. Quant au solo d’Herbie Hancock dans le latinisant Cloud Cream, il vous vous arrachera des « Aahhhh » et des « Oooooh » d’admiration bien légitimes.
“Upon This Rock”, un rien moins funky que “Penny Arcade”, donne l’occasion à Joe Beck de se mettre encore plus en valeur, et d’appuyer sur la pédale (jazz-)rock, dans Weathevane et dans le morceau-titre notamment. Jouissif ! I Won’t Be Back est issu des séances de “Penny Arcade”, et c’est donc le seul morceau avec des claviers – ceux de Tonton Herbie, of course.
Retour au groove avec “Canned Funk” et son incroyable pochette (remember le génial photographe Pete Turner…). Farrell est entouré par les mêmes musiciens que dans “Upon This Rock” – la section rythmique Herb Bushler / Jimmy Madison est des plus tight, comme on dit là-bas. Morceau de bravoure, Suite Martinique nous emmène aux confins de la fusion intergalactique des glorieuses seventies, avec bataille de sax soprano, de flûte et de guitare électriques, basse ouaoua-cosmiques et poussières d’étoiles percussives. Quel wonderful trip mes amis ! • [À suivre dans l’épisode des aventures de BGO Records : Ben Sidran]
CD Joe Farrell : “Penny Arcade / Upon This Rock / Canned Funk” (BGO Records, déjà dans les bacs et en ventre chez nos amis de Gibert Joseph, Paris VIe, rayon jazz)
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