Responsable de l’organisation et de la préservation du contenu du légendaire coffre aux archives Princières, Michael Howe est l’archiviste du Prince Estate et le découvreur de l’enregistrement inédit Prince : Piano and Microphone 1983, disponible le 21 septembre.
Muziq : Le Vault de Prince est un objet de fantasme pour de nombreux fans. Après avoir été abrité à Paisley Park pendant près de trente ans, où se trouve-t-il aujourd’hui ?
Michael Howe : Depuis plusieurs mois, le contenu du Vault a été délocalisé dans un énorme entrepôt hautement sécurisé et à température réglementée dans un coin de Los Angeles. Cet endroit ne ressemble pas à grand chose vu de l’extérieur, mais l’intérieur est très moderne et largement pourvu en équipement de pointe.
Comment s’organise le classement de ces archives ?
Le système de classement du Vault n’est pas conventionnel : toutes les bandes audio et vidéo sont étiquetées d’une manière précise, mais certaines ne le sont pas complètement. Il faut donc parfois procéder par déduction, recouper avec d’autres informations, comme par exemple le modèle de bande magnétique utilisé lors de telle ou telle période, les track sheets ou le nom des ingénieurs du son qui travaillaient avec Prince à l’époque.
De quelle manière avez-vous localisé l’enregistrement de Piano & A Microphone 1983 ?
J’étais au courant de l’existence de cet enregistrement car il circulait depuis plusieurs années dans le circuit des collectionneurs, mais personne ne savait où se trouvait ce master, ni comment il avait été répertorié dans les archives et ni sous quel format. Nous avons donc lancé une recherche très approfondie dans notre base de données, un vrai travail de détective et par chance, nous avons réussi à mettre la main sur cette cassette TDK. Le son des cassettes a toujours été de piètre qualité par rapport à d’autres supports audio. Prince en utilisait beaucoup lorsqu’il travaillait sur ses maquettes dans son home-studio et il existe des milliers de cassettes de ces enregistrements (plus de 7000, ndr.). Malgré les limitations sonores de ce format, son contenu est si chargé émotionnellement que l’Estate a pris la décision de le révéler au grand public. Après avoir mis la main sur cette cassette, je l’ai envoyée à Troy Carter, le représentant du Prince Estate, et il a été très ému par ce qu’il a entendu. Il a ensuite proposé aux responsables de l’Estate de publier cet enregistrement. Bien entendu, il ne s’agit pas d’un album studio inédit de Prince, mais ce document est si fascinant et inconnu du grand public -à l’exception des fans hardcore- qu’il méritait de voir le jour.
Au-delà de la remasterisation, avez-vous procédé à des modifications sur cet enregistrement original ?
Non, il n’y eu aucun editing. Il s’agit de l’intégralité du contenu non retouché de cette cassette que nous avons simplement numérisée en 24-bits dans ProTools. Il n’y a ni coupure, ni montage, ni ajout sur ces 37 minutes de musique. La première partie de cet enregistrement consiste en un medley improvisé de sept chansons. À la fin de ce medley, la cassette change de face et contient deux chansons individuelles.
Avec ses plusieurs milliers de références, la majorité du contenu du Vault de Prince ne risque-t-elle pas de rester inédite à jamais ? De quelle manière envisagez-vous l’avenir de ces archives ?
Nous en parlons beaucoup entre nous. Avec le Prince Estate, nous avons pour but de préserver et de promouvoir l’héritage musical de Prince avec la plus grande intégrité. Ma mission est celle d’un conservateur de musée chargé de classer chronologiquement toutes les oeuvres d’art de ce musée. Bien sûr, il faudrait plusieurs vies pour assimiler tout ce matériel si vaste et si riche. La question de sa diffusion se pose encore…
Propos recueillis par Christophe Geudin
Prince Piano & A Microphone 1983 (Warner). Disponible en CD, vinyle, versions digitales et édition collector CD/Vinyle le 21 septembre.
À lire également : interview exclusive de Lisa Coleman, auteure du livret de l’album, dans Jazz Magazine n°709.