Brittany Howard, la frontwoman d’Alabama Shakes, signe avec Jaime son premier album solo et un des albums transversaux les plus remarquables de 2019.
Muziq : Jaime est votre premier album solo en marge d’Alabama Shakes. Il sonne également plus « artisanal ». De quelle manière l’avez-vous conçu ?
Brittany Howard : J’ai démarré ce projet en écrivant des chansons dans une petite maison de Topanga, pas loin de Los Angeles, il y a des années. Au fil des ans, j’ai enregistré des démos sur mon MacBook, puis j’ai rassemblé ces titres dans mon petit studio de Nashville. C’était très artisanal, et à l’aide du logiciel Logic, j’ai commencé par travailler les beats, puis les claviers, les guitares et j’ai fini par poser ma voix. Plusieurs de ces parties originales sont restées sur la version finale de Jaime, et c’est ce qui donne un côté « maquette » à l’album.
Jaime est également expérimental par moments, tout en abordant de genres musicaux familiers.
Tout à fait, et c’était volontaire : quand vous écoutez Boys and Girls, le premier album d’Alabama Shakes, et Sound & Colour, le deuxième, vous vous retrouvez en face de deux disques complètement différents. Jaime est assez proche de Sound & Colour d’un point de vue sonique, mais je pense que Jaime va plus loin, et surtout, qu’il est véritablement la synthèse de toute la musique que j’ai écouté jusqu’ici. Il y a un peu de tout, de la synthpop, du R&B, de la soul, du blues et du rock. Ça va de Dion aux Marvelettes jusqu’à Prince, que je vénère*.
Qui sont les musiciens présents sur Jaime ?
Zack Cockrell, le bassiste d’Alabama Shakes, joue sur tous les titres. Nate Smith, un des meilleurs batteurs du moment, est également présent. Robert Glasper joue des claviers sur certains titres. Chacun connaissait la musique de l’autre avant notre rencontre, et je sais que nous avions la même envie de collaborer. Le titre « 13th Century Metal » vient de lui. Je simplement édité ses parties de claviers, puis j’ai posé ma voix par-dessus. Robert joue aussi de l’orgue à la fin de « Georgia » et c’est superbe. Sinon, Paul Horton, qui accompagne Alabama Shakes aux claviers sur scène, joue du clavinet sur « History Repeats » et Larry Goldings intervient sur quelques chansons, dont « Tomorrow ». Il a aussi beaucoup contribué au son global de l’album.
Avez-vous songé à destiner certains titres de Jaime à Alabama Shakes ?
En effet, j’avais songé à en enregistrer quelques-unes avec le groupe. Nous en avons même testé quelques-unes en studio, mais ça ne marchait pas vraiment et j’ai préféré les conserver sur mon disque dur. Je crois aussi que le sujet de cet album était trop délicat pour être manipulé et retravaillé dans le cadre d’Alabama Shakes. C’est un disque très personnel. Il est dédié à et porte le nom de ma sœur Jaime, qui est décédée lorsque j’étais adolescente. Elle était également musicienne, et je voulais plus que son nom ne soit plus synonyme de tristesse, mais se transforme hommage à toutes les choses qu’elle aimait : la musique, l’art et la créativité. dans cet album, j’aborde également la question de l’identité sexuelle et du racisme, car j’envisage aussi Jaime comme un acte de résistance. Par-dessus tout, ce disque est chargé d’espoir, et il marque le début d’une ère nouvelle pour moi.
Brittany Howard Jaime (Columbia/Sony Music). Disponible.
* Brittany Howard reprend actuellement le titre de Prince « The Breakdown » sur sa première tournée solo.
Directeur de publication : Édouard RENCKER
Rédacteur en chef : Frédéric GOATY & Christophe GEUDIN
Direction artistique : François PLASSAT
Édité par Jazz & Cie, 15 rue Duphot, 75001 Paris
Tous droits réservés ©Jazz & Cie - 2015