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Les bons grooves de Mr. Bongo

Le label anglais fondé en 1989 vient de rééditer trois de ces raretés dont les collectionneurs se régalent : “The Devil Is Loose” de la chanteuse indienne Asha Puthli, “I Love You More and More” du chanteur Tom Brock et “Teaspoon And The Waves” du saxophoniste aud-africain Teaspoon Ndlelu.

MR. BONGO Asha Puthli

New York, Columbia Studio C, 13 septembre 1971. Entourée de Dewey Redman, Charlie Haden, Ed Blackwell et Billy Higgins, une jeune chanteuse indienne enregistre… deux instrumentaux chantés ? deux chansons instrumentales ? – difficile à dire… – sous la direction d’Ornette Coleman, qui leur réservera une place de choix dans son chef-d’œuvre de l’époque, “Science Fiction”. Ainsi mise en lumière, Asha Puthli signe quelque temps plus tard un contrat d’enregistrement avec CBS. Et en 1976 sort en Europe – mais pas aux États-Unis – “The Devil Is Loose”, opus disco-funky pop longtemps oublié mais qui en son temps fit les beaux jours, pardon, les belles nuits du Loft de David Mancuso. Car sur la seconde face de ce 33-tours charmant et somme toute attachant qui vient donc d’être réédité en vinyle et en CD (pas de jaloux) figurait une pépite prêt-à-danser, arrangée avec autant d’inventivité que d’efficacité, Space Talk, un truc qui colle au cœur au corps et au corps qu’il est bien difficile de ne pas écouter plusieurs fois de suite, envappé par ces synthés cosmiques, ce groove terrien et cette basse ronronnante. On adore. Les meilleurs producteurs hip-hop des années 1990 partageaient notre avis : Space Talk a plus d’une fois été samplé.

MR. BONGO Tom Brock

Je ne sais plus où, récemment, j’ai lu que “I Love You More and More” du Texan Tom Brock « trônait dans le panthéon musical » de certains « aux côtés de des trésors intemporels de la soul comme “What’s Going On” de Marvin Gaye ». On se calme, on boit frais et on ne mélange pas tout. “I Love You More and More” n’est évidemment pas un chef-d’œuvre absolu. Ce qui ne l’empêche pas d’être un disque absolument indispensable, magnifiquement produit et arrangé, par rien moins – mais ça vous le savez sans doute déjà – que Barry White et Gene Page. Et d’ailleurs, dès les premières mesures de la chanson-titre, petit bijou soul soft, on s’attend à entendre la voix de velours de Maître White, mais non, c’est bien celle de Tom, qui nous la joue plutôt Marvin (Gaye, pas Hagler). Et puis tous ces violons et ces guitares wah-wah dans Naked As The Day I Was Born (l’esprit de Marvin est encore là), comment résister ? Impossible.

MR. BONGO Teaspoon And The Waves

Los Angeles, Hollywood Recorders, 1977. Le grand Lamont Dozier est en train de peaufiner son classique instantané, Going Back To My Roots. À ses côtés, son producteur Stewart Levine, deux membres des Crusaders (Joe Sample et Wilton Felder), David T. Walker, Ray Parker, Jr. et James Gadson. Mais aussi le trompettiste sud-africain Hugh Masekela, venu en ami, et qui signe l’arrangement rythmique de ce tube fantastique. Il a aussi convié ses élèves d’U.C.L.A., chanteuses et chanteurs du même pays que lui. Dozier ouvre les micros, et les voilà qui posent des chœurs ajoutant une touche inimitable à Going Back To My Roots, qui devient rapidement un morceau culte en Afrique du Sud, encore sous le régime de l’Apartheid. Pour preuve : Going Back To My Roots fut adapté aussi sec par le saxophoniste Teaspoon Ndlelu dans son deuxième disque, “Teaspoon And The Waves”, paru à l’origine sur le label Soul Jazz Pop. Le groove mémorable de piano (joué par Joe Sample dans le disque de Lamont Dozier) fut repris, comme mis en boucle, et le refrain devint « Ooooh yeh Soweto », faisant de cette joyeuse cover une vraie curiosité musicale, lovée au milieu d’un album sans faille qui a tous les atouts pour (re)devenir culte.

CD/LP
Asha Puthli : “The Devil Is Loose” (1976)
Tom Brock : “I Love You More and More” (1974)
Teaspoon And The Waves : “Teaspoon And The Waves” (1977)