L’indispensable label de rééditions BGO Records ressort enfin les deux premiers albums du grand guitariste de jazz américain.
“With A Little Help From My Friends” (1968) et “Singing / Playing” (1973) de Larry Carlton ont déjà été réédités il y a vingt-cinq ans (!) en CD par Edsel Records (les prix commençaient à grimper en flèche, même pour un exemplaire d’occasion…), mais le traitement de faveur éditorial de BGO Records, à nul autre pareil, les remet enfin en pleine lumière : remasterisation soignée, livret savant signé par Charles Waring.
Car avant de devenir l’un des guitaristes, producteurs et arrangeurs les plus demandés des studios d’enregistrements états-uniens, le natif de Torrance (Californie) avait publié deux albums sous son nom, passés inaperçus en leur temps. Le premier a beau flirter tranquillement avec le easy listening, il n’en révèle pas moins un jeune guitariste de 20 ans à peine qui connaît déjà sur le bout des doigts son Wes Montgomery – ah !, ce jeu en octaves parallèles ! Avec ses reprises de standards pop/soul (Eleanor Rigby, MacArthur Park, People Get Ready…), “With A Little Help From My Friends” est dans la lignée des derniers disques du grand Wes publiés sur A&M / CTI , tels “A Day In The Life” ou “Road Song” (boudés par les puristes mais qu’un Pat Metheny avait appris par cœur…).
Cinq ans plus tard, Larry Carlton, devenu entre temps le guitariste attitré des Crusaders – il joue sur les meilleurs albums du groupe –, signe avec le label Blue Thumb et sort “Singing / Playing”. Son jeu a considérablement gagné en originalité : exit le clone de Wes, bienvenue à un maître au toucher et au phrasé uniques, et à la finesse et la technique largement au-dessus de la moyenne. Larry Carlton n’est pas le chanteur du siècle, mais certainement l’un des guitaristes les plus admirés et respectés de ces cinquante derbières années. “Singing / Playing” est riche en surprises, de l’ouverture soft rock de Easy Evil (fantastique solo) au déluge électrique de Free Way (vous n’avez jamais entendu Carlton jouer comme ça) en passant par le R&B façon Allen Toussaient (One More Chance) et le magnifique With Respect To Coltrane (qu’une autre légende des studios, le saxophoniste Tom Scott, avait composé et enregistré en 1969 pour son premier album Impulse, “Rural Still Life”).
Et pour ne rien gâcher, il est accompagné par la cream de la crème des session men californiens : Michael Omartian au piano et au piano électrique, Max Bennett à la basse, Jim Gordon et John Guerin à la batterie, et trois croisés bien connus des lecteurs de muziq.fr : Wilton Felder (basse), Joe Sample (Fender Rhodes) et Stix Hooper (batterie).
Il faut impérativement écouter ce disque avant de se replonger dans ses meilleurs opus Warner Bros. (“Larry Carlton”, “Mr. 335 Live In Japan ”, “Sleepwalk”, “Friends”…), ses apparitions miraculeuses (“Hejira” de Joni Mitchell, “Royal Scam” de Steely Dan…) et ses productions (“Adventures In Paradise” de Minnie Riperton, l’unique opus éponyme de Vapour Trails, vous connaissez ?).
CD “With A Little Help Ftom My Friends / Singing / Playing” (BGO Records).