Kate Bush en quête de frissons

Deux ans après ses inespérés concerts londoniens, le triple cd live de la diva surréelle sort enfin.

À ceux qui ont eu le bonheur de pouvoir assister à l’un des concerts donnés par Kate Bush en 2014 (tel l’envoyé spécial de Muziq, Christophe Geudin), “Before The Dawn” doit faire l’effet de la BO d’un film qui leur a laissé, j’imagine, un merveilleux souvenir. Pour les autres, il sera peut-être un peu plus difficile d’être captivé d’un bout à l’autre par ce triple live au minutage certes généreux (près de trois heures de musique). Pour son incroyable comeback scénique, trente-cinq ans (!) après sa seule et unique tournée de 1979, Kate Bush a osé zapper la majeure partie de ses classiques intemporels, qui hantent pourtant l’inconscient collectif depuis des lustres. Pas de Wuthering Heights ni de Babooshka. Point d’Army Dreamers. Sat In Your Lap ? Experiment IV ? N’y songez pas. The Man With The Child In His Eyes ? Dans vos rêves !

En revanche, la diva mystérieuse a revisité la quasi intégralité de son chef-d’œuvre absolu, “Hounds Of Love” (dont, au passage, on serait prêt à payer une somme folle pour une édition Superdeluxe). Le CD 2 s’attarde sur sa sombre, sublime et perturbante ex-face 2, The Ninth Wave ; Hounds Of Love et Running Up That Hill (A Deal With God) – la chanson la plus géniale des années 1980 avec Sign ‘O’ The Times ? – sont interprétés dès le début du concert, qui se termine par Cloudbusting.
Au merveilleux butin d’“Hounds Of Love”, Misses Bush a ajouté quelques pétites extraites d’albums plus récents qui, il faut bien l’avouer, comptent plus pour elle que pour nous, même si l’on se surprend parfois à les redécouvrir, et à les aimer un peu plus, passé le temps des déceptions initiales – “Never For Ever”, “The Dreaming” et “Hounds Of Love” avaient placé la barre si haut… Ainsi, Never Be Mine, Lily ou encore le magnifique King Of The Mountain, son dernier grand classique, extrait de l’ambitieux “Aerial” de 2005 (auquel elle donne aussi beaucoup de place), procurent certaine émotion. La voix de la diva ne se perd plus dans les nuages, elle est revenue à hauteur d’homme – à hauteur d’âme ? Moins sidérante, sans doute, mais certainement plus humaine. [Celle de Peter Gabriel nous fit récemment le même effet : les merveilleux excentriques britons vieillissent donc bien, NDR.]

On croise désormais les doigts pour que ce triple live (quadruple si vous êtes plutôt vinyle que CD) se transforme rapidement en dvd ou en blu-ray. Mais à en croire ce qu’elle confie à son intervieweur dans l’avant-dernier numéro de Mojo, son esprit semble déjà tourné ailleurs… « J’aimerais faire quelque chose de… nouveau ! » Vous savez déjà quoi ? « Non. »
Il faut donc s’attendre à tout. Nouveaux concerts ? Nouveau disque ? Un film ?
Joyeux Noël Madame Bush, vous dont la quête de frissons semble infinie. •

CD/LP “Before The Dawn” (Fish People / Warner Music).