La patronne des Pretenders revient cette semaine avec un disque de jazz sous le bras, “Valve Bone Woe”. Doc Sillon est sous le charme.
Rendez-vous compte les ami(e)s : Chrissie Hynde, LA Chrissie Hynde, singer songwriter qui berce mon petit cœur de rockeur depuis des lustres vient d’enregistrer un disque de jazz ! Oh, pas un rogaton jazzy façon caprice de rock star vieillissante en quête d’un nouveau public adulte et friqué, non, non, un vrai disque de chanteuse, de vocalist comme on dit dans son pays natal, enregistré aux Air Studios de Londres avec un superbe big band, le Valve Bone Woe Ensemble, d’où le titre du disque, “Valve Bone Woe”.
Il y a quelques années, la disparition du grand tromboniste Bob Brookmeyer, qui jouait du trombone à valves, n’avait pas échappé à Dame Chrissie, qui avait écrit à son frère Terry, saxophoniste de jazz. « Laconique, précise-t-elle, Terry avait répondu par un genre de haïku hippie, Valve Bone Woe [Valve [trom]bone Malheur]. Je me suis dit que c’était un excellent titre pour l’album sur lequel je bossais avec le producteur Marius de Vries. Je suis une chanteuse de rock avant tout, mais j’ai grandi sur fond de jazz (merci frérot) et j’ai toujours eu un faible pour ce style. Je déplore souvent la disparition de la mélodie dans la musique populaire, et je voulais chanter des mélodies. En plus, j’ai un penchant pour les reprises. J’adore chanter quelque chose que je n’ai pas pensé à écrire moi-même. »
Brian Eno, homme de goût s’il en est, adore ce disque et le dit haut et fort dans le dossier de presse : « Absolument sensationnel ! L’intégrité et la maturité de cette œuvre me sidèrent ; on a l’impression qu’ils ont joué ce genre de musique toute leur vie. La production est incroyable, je n’aurais jamais imaginé qu’un répertoire pour big band, dans toute sa gloire sale et grasse, puisse se combiner magnifiquement avec l’électronique. Un disque extraordinaire. » Ben dis donc… « Avec l’électronique » dit notre Roi de l’ambient ? Ben oui, y’en a, subtilement distillée au gré de cet album de plus d’une heure sans faille où le big band flirte régulièrement avec le dub (la longue coda d’Absent Minded Me, Wild Is The Wind ou la géniale version de Caroline, No des Beach Boys), se la joue with strings pour le plus bel effet (I’m A Fool To Want You, Once I Loved…), et s’ébroue même sans Dame Chrissie – sur Naima de John Coltrane ou Meditations On A Pair Of Wire Cutters de Charles Mingus, où Dame Chrissie vocalise cependant discrètement.
Le timbre et le phrasé de notre rockeuse à la culture musicale XXL fait merveille, tout autant que ses inflexions soul : « Le rock and roll a supplanté le jazz dans les années 1960, dit-elle, mais le déclin du rock actuel semble annocner un regain d’intérêt pour ce genre, l’un des plus créatifs et innovants du XXe siècle. Je suis heureuse de prendre le train en marche. » Nous le sommes tout autant d’avoir notre billet pour voyager en sa compagnie.
CD/LP Chrissie Hynde With The Valve Bone Woe : “Valve Bone Woe” (BMG, sortie le 6/9).
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