Bob Dylan, le dernier Prix Nobel de littérature, était en concert à Paris (Zénith) hier soir. Compte-rendu.
Depuis près de 25 ans, tout concert de Bob Dylan nécessite une mise en condition particulière pour le détenteur de ticket : 1/ Se dire que Dylan ne jouera pratiquement pas les étendards folk de son glorieux catalogue sixties et que s’il le fera, ceux-ci seront défigurés par un organe péniblement guttural, quelque part entre le métalleux scandinave et Renaud. 2/ Bob ne jouera pas de guitare, mais restera glué à son tabouret de piano pour contrôler les shuffles invariables de son backing-band. 3/ Ces dernières années, il y a également de fortes chances que le Zim vous assomme avec ses crooneries sous Temesta – Triplicate, son dernier triple-album, équivaut à une douzaine de cures de sommeil. Bob Dylan, the Jean Sablon Years ?
Hier soir, au Zénith de Paris, première étape française du tour de chant 2017 du dernier Prix Nobel de littérature, ces trois conditions ont bien été réunies, mais avec un plus salvateur : Dylan is still Dylan, et cette nouvelle mouture du Never Ending Tour enterre toutes les dernières apparitions du barde dans la capitale. Pièce centrale d’une étrange mécanique scénique, un Dylan impliqué se laisse porter par un flot musical quasi-ininterrompu. Un réglage de basse, quelques frappes de grosses caisses et des tests micros de la guitare de l’impeccable Charlie Sexton servent de points de départ hasardeux à chaque titre. Puis l’ensemble clicke et la voix (étonnement claire par endroits) rejoint un répertoire de ballades sépias et de swings pimpants (« Duquesne Whistle »). Les hits mercuriels sont également bien présents avec un limpide « Don’t Think Twice Is Alright » joué en deuxième position dans la setlist, suivi d’un belliqueux « Highway 61 Revisited ». Plus loin, un épatant « Desolation Row », revisité en marche vers le sommet et ponctuée de fills enjoués du Dylan pianiste, anticipe un fulgurant « Love Sick », un « Tangled Up In Blue » à la mélodie vocale totalement déstructurée puis, en premier rappel, le fédérateur « Blowin’ in the Wind » réinventé en délicieuse valse country.
Plus Chaplin que Dean Martin, un Dylan revitalisé quitte même son piano pour venir crooner et esquisser quelques discrets pas de danses au milieu de la scène – gros succès pour un délicat « Stormy Weather » et « Autumn Leaves », l’adaptation des « Feuilles mortes » de Prévert et Kosma. Un hargneux « Ballad of a Thin Man » vient conclure l’affaire au bout de 110 minutes. Comme à son habitude, Dylan n’a pas prononcé un mot à l’intention du public de toute la soirée, mais nombreux sont ceux qui jurent l’avoir vu sourire…
Setlist
Things Have Changed
Don’t Think Twice, It’s All Right
Highway 61 Revisited
Beyond Here Lies Nothin’
I Could Have Told You
Pay In Blood
Melancholy Mood
Duquesne Whistle
Stormy Weather
Tangled Up In Blue
Early Roman Kings
Spirit On The Water
Love Sick
All Or Nothing At All
Desolation Row
Soon After Midnight
That Old Black Magic
Long And Wasted Years
Autumn Leaves
Blowin’ In The Wind
Ballad Of A Thin Man
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