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Santana et Marcus Miller, une soirée afro-latino à Montreux

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Montreux, semaine 2. La canicule Vaudoise a laissé place à une fraîcheur d’alpage. Les performances ardentes de Patti Smith, PJ Harvey, Quincy Jones et Van Morrison (voir comptes-rendus) ont également anticipé les prestations climatisées de Bill Evans (avec Dennis Chambers et Darryl Jones mais sans Mike Stern et ses deux épaules brisées l’avant-veille), Jean-Michel Jarre (qui avait l’image mais pas le son), Max Jury (épatant sur disque mais trop downtempo sur les planches), Vintage Trouble (des sous-ZZ Top vraiment pas tops) et Lana del Rey (dont les choristes et le ficus posé sur les retours avaient plus de charisme). Heureusement, Kurt Vile et son folk grungy et hirsute façon Dinosaur Jr., la forte personnalité de Rag’N’Bone Man, colosse tatoué à la voix et aux chansons pénétrantes et surtout Neil Young et ses trois heures de masterclass scénique couronnées par un rappel biblique « Cortez The Killer/Cinammon Girl » ont irradié cette deuxième semaine à la veille d’une double affiche typique de la légende Montreusienne : Marcus Miller et Santana.

Marcus Miller ouvre le programme avec un set de 90 minutes en droite lignée des concerts de la tournée Afrodeezia et ses temps forts déclarés : « J’ai écrit ce morceau pour Miles Davis quand j’avais cinq ans », blague le bassiste bilingue en ouverture de « Tutu ». Gros succès également pour le crescendo cuivré de « Gorée » et un « Blast » final émaillé d’une citation de « Who Knows » et de breaks vif-argents du sensationnel Alex Bailley aux drums. Deception à la lecture de la feuille de match de Santana : Neil Schon, Michael Shrieve et Michael Carabello sont absents de la tournée accompagnant la sortie de Santana IV, l’album de reformation du line-up classique des années septantes. Le chapeau feutré de Carlos Santana succède au pork-pie hat de Marcus Miller aux alentours de 22 heures. Huit musiciens entourent le héros de Woodstock, le célèbre sustain se déverse dans l’auditorium Stravinski mais une balance brouillone transforme le jam introductif en guacamole sonore. Quelques réglages plus loin, le Santana Show déroule son contenu festif et grand public, entre standards latino-groove (« Jin-Go-Lo-Ba », « Evil Ways »,  » Oye Como Va », « Black Magic Woman ») et citations en abondance, de John Coltrane aux Beatles. Le jeu de Carlos Santana fait preuve d’une fluidité toujours aussi étonnante – cet homme ne joue pas fuzz, il a LES DOIGTS fuzz. En revanche, la présence de Cindy Blackman (Madame Santana à la ville) derrière les fûts pose question en raison d’un certain manque de vélocité et d’un jeu peu adapté aux subtilités afro-latines. On ne souvient de la remarque vacharde -et un brin machiste- de Keith Richards au sujet de la participation de Linda McCartney dans Wings « et vous, vous emmenez votre femme tous les jours au bureau ? ». Marcus Miller, spectateur attentif depuis la coursive de ces deux heures et 20 minutes de récital Santanesque, n’a pas rejoint non plus les festivités. Un modeste regret au vu d’une soirée placée sous le signe de la paix et de la générosité. Viva lui.

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Photos : Lionel Flusin.